Il y avait plusieurs semaines maintenant que tu ne t’étais pas rendue dans ton restaurant de ramens préféré. Ce n’était pas que tu n’en avais pas eu envie, bien au contraire. Disons simplement que tu n’en avais pas eu l’opportunité et surtout, le courage. À presque 7 mois de grossesse, tu commençais à avoir du mal à te traîner. Que ce soit à cause de tes jambes qui te faisaient horriblement souffrir à cause de la rétention d’eau ou cette fatigue accablante qui ne te quittait jamais, tes sorties se faisaient de plus en plus rares. Au moins, ton mari n’avait plus à s’inquiéter pour toi puisque tu passais le plus clair de ton temps à arpenter les couloirs de votre immense villa. D’ailleurs, depuis que tu l’avais annoncé à Gabriel, tu avais eu l’impression d’avoir pris 20 kilos en très peu de temps. Ton petit ventre discret avait fini par laisser sa place à ce bidon gigantesque qui t’empêchait de dormir la nuit ou de porter les vêtements que tu aimais tant. Oui, définitivement, être enceinte n’était pas ce que tu préférais. Mais ça, tu aurais mieux fait d’y penser avant de passer une nuit torride avec ton mari et de te soûler la tête le jour d’après, te rendant malade comme un chien … Il ne fallait pas être un génie pour savoir que ta contraception s’était fait la malle, alors que tu avais la tête enfuie dans la cuvette des toilettes de ce bar miteux où l’un de tes amis t’avait emmené à l’époque …

Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, tu avais décidé de prendre ton courage à deux mains pour te rendre dans ce merveilleux restaurant qui était tenu par Saram, une bonne âme qui avait été le témoin de tes nombreuses plaintes. Une bonne âme avec qui tu avais fini par te lier d’amitié. Cela faisait tellement longtemps que tu ne lui avais pas donné de tes nouvelles, qu’en te préparant, tu avais eu la sensation d’être la plus ingrate des amies. La dernière fois que vous vous étiez vus, tu ne lui avais pas parlé de ta grossesse. Ce n’était pas que tu n’en avais pas eu envie. C’est juste que … Tu n’étais pas encore prête à l’assumer entièrement. Il t’avait fallu du temps avant d’accepter la situation et encore plus, pour trouver le courage de l’annoncer à ton mari. Pendant ces quelques semaines durant lesquelles tu avais passé ton temps à te camoufler sous des vêtements amples, tu t’étais sentie bien seule … Le sourire que t’avait adressé ton ami, avait été d’un grand soutien pour toi, bien que Saram n’en soit pas conscient … Assise devant ta coiffeuse, tu laissais échapper un sourire alors que tu essayais d’attacher ta longue chevelure ébène dans un chignon. Une petite touche de fond de teint et de mascara par ci et une petite goutte de ton parfum préféré plus tard, tu étais presque prête. La seule chose qu’il te restait à faire, c’était d’enfiler cette paire de collants en laine. Une mission très périlleuse, mais réussie au bout de plusieurs essais et tortillages dans tous les sens. Armée d’une petite robe en laine de couleur brune, qui moulait la forme de ton ventre à la perfection, tu te trouvais plutôt jolie. Ce n’est qu’une fois dans ton Uber que tu t’étais saisie de ton portable pour prévenir ton mari de ta sortie. Puisqu’il était occupé à gérer une mission qui ne te concernait pas, tu n’aurais pas besoin de te battre avec lui pour sortir. Dans ton message, tu t’étais simplement contentée de dire que tu allais manger des ramens. Est-ce que tu avais omis le fait que tu t’y rendais pour passer du temps en compagnie de l’un de tes amis ? Possible. En même temps, connaissant le tempérament jaloux de Gabriel, tu avais préféré omettre ce détail afin d’éviter une énième dispute conjugale.

Après avoir remercié le chauffeur et lui avoir réglé la course, tu étais descendue du taxi. T’approchant de la porte d’entrée du restaurant, tu n’avais pas pu t’empêcher de regarder par la fenêtre à la recherche de ton ami. Heureusement, son restaurant ne semblait pas bondé, ce qui vous permettrait de discuter sans être dérangé toutes les 5 minutes. Replaçant ta robe et ton manteau, tu t’armas de ton plus beau sourire et tu entras dans le restaurant. Fronçant un instant tes sourcils à la recherche de Saram, tu lui fis un grand signe de la main lorsque tu le vis non loin du bar. « Saramyyy ! » T’approchant rapidement pour le rejoindre, tu ne pus t’empêcher de tendre tes bras en sa direction pour lui faire un câlin surprise. Glissant tes bras autour de sa taille sans lui demander son avis, tu sautillas doucement. « Je suis si contente de te voir ! » Contente ? Tu étais heureuse même. Cela faisait tellement longtemps que tu n’étais pas sortie, surtout pour retrouver l’un de tes amis, que tu avais l’impression d’être au bord de la crise de larmes tellement tu te sentais débordante de bonheur. À moins que ce trop-plein d’émotions qui était en train de s’emparer de toi, n’était que le résultat de tes hormones de femme enceinte. Après une petite étreinte imposée, tu finis par le lâcher avant de te mettre à renifler les bonnes odeurs qui titillaient tes narines et ton estomac affamé. « Ça sent toujours tellement bon iciiii ! Je ne sais pas comment j’ai pu faire pour me passer de ta cuisine pendant aussi longtemps ! » Et … N’aurais-tu pas oublié de lui dire quelque chose ? Posant l’une de tes mains sur tes lèvres, tu te mis à pointer du doigt ton ventre avec ton autre main. « Et … Surprissssse ! Il se pourrait que mon absence de ces derniers mois, soit liée à la présence de ce petit monstre ! » Avais-tu fini par dire dans un petit rire avant de laisser retomber tes mains le long de ta taille. « Je suis vraiment désolée d’avoir fait la morte … Ça a été un peu compliqué avec le bébé et tout le reste … » Et ça, c’était le moins que tu pouvais dire !